"-Je vais peindre quelque chose et tu devras deviner ce que c'est.
-Un arc-en-ciel.
-Comment tu as deviné ?"
Un jeune caméléon peint un tableau à l'abri des yeux de son camarade. Pourtant, il a deviné ce que c'était : un arc-en-ciel. Et pour cause, le petit peintre en a pris la couleur. Un hibou a mal au cou. Pourtant, il tourne la tête à 360°. Un pigeon lui conseille de consulter un médecin… ou un exorciste. Un paresseux se réveille de deux ans de coma. Il demande encore cinq minutes pour finir son temps de repos. Une girafe accuse un lapin de porter ses vêtements sans son autorisation. Il attend des excuses, mais l'écharpe traîne quand même pas mal par terre. Un éléphant a cassé un trampoline. Il ne peut pas mieux se faire pardonner qu'en servant lui-même d'accessoire. Un chien vient de renverser une tasse de café. Il accepte l'aimable aide d'un chat qui se charge de faire tomber la deuxième. Des dauphins ont trouvé une astuce pour allumer des bougies sous la mer. Voici quelques-unes des bulles de tendresse que l'on peut lire dans cet album semblable à une boîte de bonbons doux.
© Colmenares – Hachette
Il n'y a pas que les animaux qui sont à l'honneur dans ce recueil. Il y a aussi un Lego, fixé sur son socle, bloqué au lit en fait. Il y a deux vis qui se font tourner la tête. Il y a des ballons de baudruche, dont l'un d'eux est sorti faire la fête : il est sculpté style chien de Jeff Koons. Une agrafeuse est prête à unir deux feuilles de papier pour leur mariage. Une guitare cherche son âme sœur parmi trois candidats potentiels qu'elle ne voit pas. Un nuage tricote un arc-en-ciel. Des crayons de couleurs souhaitent l'anniversaire à l'un de leurs compatriotes. Des planètes se prennent en selfie ou jouent à se faire peur. Des tire-bouchons s'aiment grand comme ça. Une boule de bowling prend un toboggan. Heureusement qu'une quille ramène du renfort pour ne pas qu'elle se blesse.
© Colmenares – Hachette
Cent-trente-cinq gags drôles, cocasses, absurdes, tendres et poétiques sont réunis dans ce recueil signé Andrès J.Colmenares. Créateur des webcomics Wawawiwa, il est suivi par cinq millions de fans dans le monde. Son graphisme et son esprit ne sont pas sans rappeler ceux de Chow Hon Lam dans la série Buddy Gator, l'alligator trop kawaï. Colmenares invite à reconsidérer les choses de la vie. Raymond Devos aurait adoré ces saynètes semblables à des haïkus dessinés. La couverture à elle seule donne le ton de tout l'album : un cheval en costume-cravate reçoit une licorne dans son bureau pour un entretien d'embauche mais recale la candidate pour manque de crédibilité.
© Colmenares – Hachette
Bulles de tendresse est le type d'ouvrage à ouvrir au hasard. A ne surtout pas lire d'un trait. C'est un livre qui s'apprécie en le picorant. Drôle et doux.
Laurent Lafourcade
One shot : Bulles de tendresse
Genre : Humour
Scénario, Dessins & Couleurs : Andrès J. Colmenares
Éditeur : Hachette
ISBN : 9782017252535
Nombre de pages : 144
Prix : 14,99 €
"-Mais je n'y connais rien en automobile, vous le savez bien, patron !
-Ecoutez mon vieux, nous sommes tous compatissants… depuis la perte de votre yorkshire…
-Mon bouledogue !
-Vous viviez seul avec lui n'est-ce pas ?
-Depuis 6 ans.
-Nous pensons que vous n'êtes plus en mesure de rédiger la page canine. Je comprends que ça puisse vous être insurmontable…
-Pas autant que de faire la rubrique mécanique."
Pour Yves Portat-Remington, la perte de son chien est une dure épreuve. Il vivait seul avec lui et les soirées sont à présent bien longues devant les émissions de l'ORTF, sans personne à câliner, sans personne à sortir, même quand c'est sous la pluie. Chroniqueur à la page canine du journal quotidien du soir Le Regard, le patron décide de le transférer à la rubrique mécanique. Trop d'affect pour poursuivre chez les chiens. Le problème est qu'il n'y connaît pas grand-chose. Pas grave, il sera aidé par Louison Bobard, spécialiste dans ce domaine comme dans tous les sports. Ils ne se marcheront pas sur les pieds au bureau. Elle est tout le temps sur le terrain. Aujourd'hui, elle est en plein Paris-Roubaix. Il va aller l'y retrouver.
© Bazile, Magne - Editions du Tiroir
Nous sommes en avril 1967. Le Général de Gaulle est au pouvoir. Le néérlandais Jan Janssen vient de remporter "l'enfer du Nord", d'un boyau. Yves et Louison (Yves pensait que c'était un garçon) apprennent à se connaître. Si leur 4x4 n'est pas loin de tomber en panne d'essence, Louison préfère éviter la station BP et attendre la prochaine station Calteix…parce qu'elle collectionne les porte-clefs qu'ils donnent en cadeau, à l'effigie des vedettes yéyé : Claude François, Johnny Hallyday, Sheila et les autres. Il ne lui manque plus que Gainsbourg. En s'arrêtant à l'une d'entre elles, Louison et Yves s'interrogent sur les mystérieux colis non demandés que reçoit le pompiste. Et que sont ces ronds rouges qui sont sur des autocollants et qui apparaissent sur des affiches laconiques en quatre par trois ?
© Bazile, Magne - Editions du Tiroir
Ronds rouges ! n'est pas à proprement parler un polar. Il y a un mystère bien sûr, mais pas réellement une problématique. L'histoire est un récit d'époque et d'ambiance. Ça tombe bien, c'est ce que Bruno Bazile sait faire de mieux. Après avoir raconté son enfance dans Hoëdic !, il nous amène en 1967, l'année du Québec libre. Ce premier tome de Louison Bobard a pour principal but de présenter les personnages. Louison a la verve et le dynamisme de Seccotine. Elle roule elle aussi en Vespa, au moins sur la quatrième de couverture. Yves est plus dans l'émotion. Ça ne se faisait pas, surtout pour les garçons, à cette époque. Pour ce qui est de l'intrigue, ce n'est qu'en plein milieu d'album qu'elle se pose. Elle ravira en particulier les amateurs de vieilles cylindrées, parce qu'elle sent bon les flaques d'essence et l'odeur de cambouis.
© Bazile, Magne - Editions du Tiroir
Bruno Bazile est l'un des dignes descendants de Maurice Tillieux. Cet album le prouve une fois de plus. Il est le transcripteur d'une époque et d'une ambiance qui ne peut laisser indifférent, en particulier les nostalgiques d'une époque que certains n'ont peut-être même pas vécue. Avec Louison Bobard, en prenant un angle pertinent, Bazile s'écarte des scénarios classiques du genre pour aller plus à la rencontre des événements du quotidien de ce temps-là. Il y a du frais dans le tiroir !
Laurent Lafourcade
Série : Une histoire vécue par Louison Bobard
Tome : 1 - Ronds rouges !
Genre : Journalisme
Scénario & Dessins : Bruno Bazile
Couleurs : Yves Magne
Éditeur : Editions du Tiroir
Collection : L'aventure
ISBN : 9782931251126
Nombre de pages : 48
Prix : 15 €
"-Attendons les ordres d'en haut. Va leur demander s'il te plaît.
-A tes ordres !
-Les ordres, ici, c'est moi qui les donne, gamin. Vous attendez quoi, un miracle, peut-être ?
-Capitaine, je n'ai peut-être que dix-neuf ans, mais moi aussi je commande une compagnie."
9 février 1939. A la frontière franco-espagnole de Portbou-cerbère, le convoi dirigé par la compagnie de Vicente Jiménez-Bravo est arrêté par les troupes françaises qui les dirigent vers un camp de concentration sur un bout de plage en bordure du golfe du Lion. Dans des lieux insalubres, Vicente fait face à la mort. Il l'a sentie tellement de fois auprès de lui qu'il n'en a plus peur. Quelques années plus tôt, en 1936, il vivait en famille à Madrid, jusqu'au jour où il décida de s'engager en prenant les armes pour défendre le gouvernement et affronter les troupes du Général Franco. Il a fait ses armes dans une guerre interne avant d'être mêlé au plus grand conflit mondial.
© Pau - Paquet
On le sait dès la première planche, Vicente sortira vivant de la tragédie, ce qui sera loin d'être le cas pour ses camarades. Le préambule se passe à Majorque en 1983. Comme tous les étés, Pau et ses cousins passent leurs vacances avec leurs grands-parents. Vicente, dit Yoyo, c'est leur grand-père. Tous les midis, pendant le pique-nique sur la plage, il leur raconte ses histoires de guerre. C'est donc qu'il en est revenu. Quand il est mort en 1999, la famille a retrouvé dans ses affaires trois vieux cahiers manuscrits dont personne n'avait entendu parler. L'homme avait rédigé ses mémoires dans l'après-guerre, témoignage historique majeur. Le rédacteur les dédie à sa mère et à ses frères et sœurs qui l'ont accompagné par la pensée dans tous les moments de souffrance. Ce sont donc ces cahiers que son petit-fils Pau met en images.
Ça fait quelques années que Pau est lu en France. Après une incursion dans Spirou, il a publié plusieurs albums chez Paquet, dont notamment l'excellente histoire du pilote automobile Curtis Hill. Avec ce premier album des 5 drapeaux, il inaugure une saga historique qui risque de marquer sa carrière en le faisant entrer dans la cour des grands auteurs de bande dessinée.
© Pau - Paquet
Dans son univers animalier caractéristique, Pau ne choisit pas la facilité en présentant un récit qui ne se déroule pas dans l'ordre chronologique. Ici, il distingue la période de la guerre civile espagnole, en couleurs classiques, de la période où il est prisonnier de guerre en France dans des pages sépia. On découvrira dans les albums suivants les tons rouges du corps expéditionnaire britannique, le noir et blanc des travaux forcés nazis et les gris de l'esclavage et la répression de retour dans l'Espagne franquiste.
En fin d'ouvrage, un imposant dossier de notes et de recherches assoit le contexte historique.
© Pau - Paquet
Laissons le mot de la fin de cette chronique et du début de cette série à Vicente lui-même : "Le plus bel âge de la jeunesse est, sans aucun doute, entre 17 ou 18 et 30 ans. Moi, à cet âge, de 17 à 27 ans, j'ai, on peut le dire, été privé de ma liberté. Pendant toutes ces années, j'ai servi sous cinq drapeaux différents, qui marquèrent mon chemin et ma vie à jamais." Les cinq drapeaux est, c'est inévitable, à ranger sur la même étagère que Maus.
Laurent Lafourcade
Série : Les cinq drapeaux
Tome : 1 – Liberté, égalité, fraternité
Genre : Histoire
Scénario, Dessins & Couleurs : Pau
Éditeur : Paquet
ISBN : 9782889324576
Nombre de pages : 112
Prix : 18 €
La méthode Raowl, c'est maboul !
La maboule méthode Raowl propose des câlins gratuits. Avec une masse d'armes gigantesque en main, ça ne peut que faire du bien. Plus concrètement, Raowl va nous apprendre cette semaine qui est le meilleur sauveur de princesses en détresse dans un récit complet de cinq planches déstructurées incroyables.
Pendant ce temps, les abonnés vont encore une fois partager leur bonus avec tout le monde puisqu'il s'agit du poster Elliot au collège.
Spirou, ami, partout, toujours.
© Grosjean, Riccobono - Dupuis
Histoires à suivre :
Cœurs de ferraille (Les) : Sans penser à demain |
Munuera / BeKa / Sedyas |
Lieutenant Bertillon : Sedna |
Pomès /Barth / Drac |
Métier le plus dangereux du monde (Le) : Le temps suspendu |
Lai / Bocquet / Alquier |
Spirou et Fantasio : La baie des cochons |
Elric / Lemoine / Baril |
Récit complet :
La méthode Raowl : Qui est le meilleur sauveur de princesses en détresse ? |
Tebo |
Gags (strips, 1/2, 1 et 2 planches) :
Annabelle pirate rebelle |
Ghorbani / Sti / Cerise |
Boule & Bill |
Cazenove / Bastide / Pedriset |
Brad Rock |
Jilème / David |
Capitaine Anchois |
Floris |
Dad Flashback |
Nob |
Des gens et inversement (La pause-cartoon) |
Berth |
Edito (L’) |
Erre / Fabcaro / Greff |
Elliot au collège |
Grosjean / Riccobono |
Fifiches du Proprofesseur (Les) (La pause-cartoon) |
Lécroart |
Fish n chips (La pause-cartoon) |
Tom |
Game over |
Midam / Adam / Patelin / BenBK |
Kid Paddle |
Midam / Adam / Benz / Angèle |
Spoirou & Fantasperge (Marges) |
Sti |
Strip dont vous êtes la star (Le) |
Libon / Salma |
Tash & Trash (La pause-cartoon) |
Dino |
Rubriques :
3 infos 2 vraies 1 fausse |
Bercovici / Bernstein / Le Gall |
Coin des lecteurs (Le) : Bienvenue dans ma bibliothèque |
Berth |
En direct du futur : Le papier de votre Spirou |
|
Jeux : Les mythes de la Grèce Antique ! |
Antoine / Morin |
Leçon de BD (La) |
Dab's |
Supplément:
Poster Elliot au collège |
Grosjean / Riccobono |
En kiosques et librairies le 12 Juin 2024
3,20 €
Laurent Lafourcade
"-C’est assez chaotique, on ne comprend pas tout ce qui se passe, on a du mal à savoir si les héros s’enfuient ou s’apprêtent à se battre.
-Les deux, peut-être.
-Marina, est-ce qu’on sait d’où vient cette porte ?
-Je vous avoue que je n’en ai pas la moindre idée.
-Vous savez à quoi elle me fait penser ? A un pod de téléportation.
-Je vous rappelle quon n’a jamais eu de preuve que ces pods existaient. Ce ne sont que des rumeurs.
-Ah, attendez, quelque chose a franchi la porte… Qu’est-ce que c’est ? Des yeux ? »
Pendant que Louna et Ziad Lefki assistent à la cérémonie des Golden powers récompensant les meilleurs superhéros, leurs parents découvrent leur participation à la télévision, depuis le fast-food familial. Ils ignorent tout de la condition de leurs enfants et regardent, affolés, la fête qui prend un tour dramatique. Un pod de téléportation est apparu dans la salle. Des yeux lançant des lasers surgissent et tirent sur tout ce qui bouge. Les super-héros contre-attaquent. Protégés par l’un d’entre eux, Louna, Ziad et Billie, l’une de leurs camarades, parviennent à s’enfuir par la porte d’où ont jailli les yeux destructeurs. Ils vont se retrouver dans leur monde avant de reprendre une porte qui les fera déboucher sous la mer. Coincée dans un filet de pêche, Louna est mal en point et ne peut atteindre la surface. Sauvée par ses compatriotes, elle n’a toujours pas repris connaissance lorsqu’ils débarquent sur le quai d’une ville à demi détruite.
© Lai, Bocquet, Alquier - Dupuis
Après le double tome 1, étant consacré l’un à Louna, l’autre à Ziad, l’aventure continue en commun pour le frère et la sœur. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle démarre sur les chapeaux de roue. Si Louna a toujours voulu devenir super-héroïne, Ziad porte son destin comme un fardeau. Mais pour sauver sa sœur, il n’aura pas d’autre choix que de prendre les choses en main. Avant de mourir, White Noise lui a laissé un rubik’s cube noir et blanc grâce auquel il « trouvera la lumière dans l’obscurité ». Billie, qui les accompagne, n’est pas n’importe qui. C’est la fille de Sudden Impact et de Slow Mo. Sauront-ils unir leurs forces pour sauver Louna ?
© Lai, Bocquet, Alquier - Dupuis
Olivier Bocquet s’empare du thème des super-héros pour à la fois lui rendre hommage et en même temps le moderniser en l’ancrant dans l’air du temps. On le sait encore plus depuis leur renouveau sur les écrans, les super-héros, avant d’être les sauveurs de l’humanité, sont aussi des êtres profondément perturbés et dont le pouvoir est aussi un fardeau. C’est certainement pour cela que c’est le métier le plus dangereux du monde. Dans cet épisode, Bocquet positionne Ziad en alter ego du lecteur qui n’a pas d’autre solution que de prendre confiance en lui. Pour Ziad, débute ce qui s’apparente à une quête initiatique. A part lui, le scénariste fait la part belle aux personnages féminins, qu’ils n’hésitent pas à se sacrifier pour protéger autrui, ou qu’ils enquêtent pour démêler l’intrigue. Avec les couleurs de Fabien Alquier, Fabio Lai passe d’une scène à l’autre avec vivacité, dynamisme et pop-attitude. Notons que pour accentuer tout ça, les deux premiers volumes de la série ont été remaquettés.
© Lai, Bocquet, Alquier - Dupuis
On pouvait compter sur les univers Marvel et DC. Bienvenue dans le Bocquet-verse pour un reboot du concept même de super-héros. On croyait le thème réservé. Faux, il ne l’est pas, mais il réserve lui-même des surprises dont cette série en est une.
Laurent Lafourcade
Série : Le métier le plus dangereux du monde
Tome : 2 - Le temps suspendu
Genre : Aventure
Scénario : Olivier Bocquet
Dessins : Fabio Lai
Couleurs : Fabien Alquier
Éditeur : Dupuis
ISBN : 97910347
Nombre de pages : 64
Prix : 12,95 €
"-Tu reviens bientôt, Astérix ?...
-Je serai de retour pour déjeuner, Obélix…"
L'ouvrage s'ouvre sur une préface de Christian Godard, l'un des derniers monstres sacrés de l'âge d'or d'une bande dessinée qui a traversé les générations. Présent dès le numéro zéro, qui mieux que lui pouvait présenter cette enquête sur la création de Pilote ? Le livre dont il est question n'est pas un livre sur l'histoire de Pilote, mais un livre sur sa genèse. L'intérêt en est d'autant plus exceptionnel qu'il nous raconte les coulisses méconnues restées dans l'ombre. Godard raconte sa rencontre avec Goscinny, avant Pilote, le projet de numéro zéro en 1959, leurs travaux en commun, la direction bicéphale Goscinny-Charlier, les conférences de rédaction, le tournant de Mai 68, l'évolution de ses rapports avec Goscinny, son départ du journal, puis son retour quelques années plus tard. Mais avant tout ça, il y avait quoi ?
© Kastelnik, Gaumer, Lemoine, Lebailly – La déviation
On découvre dès les premières pages qu'il y a eu un projet Pilote plusieurs années avant celui que nous connaissons tous, porté par un certain François Clauteaux. Fin 1944, avec quelques camarades dont Louis-Martin Tard qui trouve le titre, il pose les bases d'un magazine de reportages et d'enquêtes. La maquette ne convaincra pas. Clauteaux se dirigera après-guerre vers un autre média : la radio et la publicité. Il déniche le jeune Rodolphe, un gamin qu'il utilise dans des publicités et qui plus tard se retrouvera en photo dans Pilote, mais on n'y est pas encore.
© Kastelnik, Gaumer, Lemoine, Lebailly – La déviation
Le chapitre suivant raconte les années Worlds, de 1945 à 1956. Cette agence était à l'époque le principal fournisseur de contenu pour les éditions Dupuis. Dirigée par Georges Troisfontaines, y travaillent entre autres Goscinny, Uderzo, Charlier, Hubinon et Jean Hébrard, qui avait failli faire partie de l'aventure Pilote version Clauteaux si ses engagements militaires ne l'en avaient pas empêché. Au final, ce n'était pas grave puisque le projet n'avait pas abouti. On y suit les aventures éditoriales de Pistolin et de Risque-Tout, avant la scission entre des auteurs et un patron trop intéressé qui débouchera sur la signature d'une charte et d'un syndicat d'auteurs. Philippe Charlier, fils de Jean-Michel, apporte son éclairage sur son père dans cette aventure Worlds Press.
© Kastelnik, Gaumer, Lemoine, Lebailly – La déviation
Suit l'épopée Edifrance de 1956 à 1958, dont Hébrard sera PDG. Charlier, Uderzo et Goscinny sont de la partie. Ils relancent Pistolin, avec dans l'équipe Hubinon et Martial. Puis, c'est la tentative avortée du Supplément illustré en 1957 qui aurait été destiné à des journaux du week-end, avec un casting plus qu'alléchant dont Jijé, Peyo, Will, Sempé, Franquin ! Les quatre pages du projet sont reproduites en intégralité. Après l'aventure du magazine Radio-Télé, c'est l'arrêt de Pistolin et la raréfaction des productions, parce que les auteurs sont allés voir ailleurs, qui vont grandement diminuer les activités de la boîte qui était devenue Edifrance. Mi-58, voici le retour de François Clauteaux qui sollicite Jean Hébrard.
© Kastelnik, Gaumer, Lemoine, Lebailly – La déviation
Nous sommes donc en 1958. L'aventure de Pilote va réellement débuter. Clauteaux, Hébrard, Goscinny, Charlier et quelques autres planchent sur un nouveau projet qui serait le Paris-Match des 10-15 ans. Uderzo réalise une maquette, avec l'aide d'autres auteurs. On peut l'apprécier elle aussi en intégralité. Il va falloir à présent trouver un financement. Dans une seconde maquette, on remarque la planche Le roman de Renart de Goscinny et Uderzo, projet qu'ils devront abandonner puisqu'un autre auteur s'en est déjà emparé chez Vaillant. C'est de la contrainte que naîtra l'idée de génie puisque cela amènera à la naissance d'Astérix à l'été 59. Petit à petit, l'équipe s'étoffe avec l'arrivée de Godard. Des vedettes se préparent : Michel Tanguy et Barbe-Rouge attendent le top départ. Le coin didactique du Pilotorama est en gestation. On est même invités à la préparation de la mythique photo de groupe des auteurs du journal qui se trouvera en une du Pilote numéro zéro, lui aussi reproduit en intégralité, avec les emplacements vides des publicités prévues. Un mystère demeure avec la très hypothétique existence d'un autre numéro zéro avec un enfant Arlequin en couverture.
Astérix®-Obélix®-Idéfix® / © 2023 Hachette Livre / Goscinny-Uderzo
© Kastelnik, Gaumer, Lemoine, Lebailly – La déviation
Après tous ces préparatifs, c'est le 29 octobre 1959 que paraît le numéro 1 du journal Pilote, le grand magazine illustré des jeunes, à grands renforts de publicités, trente pages reproduites elles-aussi. Georges Guéthary chante Ohé, Pilote !, un indicatif radiophonique pour le magazine. Six semaines plus tard, en raison de déboires familiaux, François Clauteaux quitte déjà la rédaction en chef. Une crise financière touchant le diffuseur met le journal en péril, avant l'arrivée providentielle de Georges Dargaud, mais là, on aborde déjà une autre histoire.
On n'avait pas lu de livre aussi pointu depuis La véritable histoire de Spirou de Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault et dont on attend avec impatience le troisième et dernier tome. Le quatuor Christian Kastelnik (qui fait des recherches depuis plus de vingt ans sur le sujet), Patrick Gaumer, Clément Lemoine et Michel Lebailly mène une enquête tout aussi passionnante sur les origines de Pilote. De quoi se replonger ensuite avec délectation dans les imposantes Années Pilote, de Gaumer, parues chez Dargaud.
Laurent Lafourcade
One shot : Pilote La naissance d'un journal
Genre : Ouvrage d'étude
Auteur : Christian Kastelnik, Patrick Gaumer, Clément Lemoine, Michel Lebailly
Éditeur : La déviation
ISBN : 9791096373581
Nombre de pages : 320
Prix : 50 €
"-Allez, bon sang ! Ça a intérêt à marcher cette fois ! C'est parti ! J'invoque les armes de Mû… et la licorne Kitalpha ! Pas d'armes… et pas de licorne. Pourquoi ça ne fonctionne pas ?! C'est pourtant bien moi… l'héritière de Mû."
Céleste est une héricorne, une héritière à la licorne. Sa sœur la princesse Astra devait se rendre au temple de la déesse pour lui demander protection, paix et prospérité pour tout le pays. Malade, elle a dû laisser Céleste partir à sa place. Il y a cent ans, leur grand-mère Luna revenait de Lémuria après un long périple. Un siècle plus tard, la mission en incombe donc à l'une de ses petites-filles. Parmi ses camarades de voyage, Izandre invoque sans succès les armes de Mû et la licorne Kitalpha. Elle ne comprend pas ce qu'il se passe. C'est pourtant bien elle l'héritière de Mû. Pendant ce temps, les orcons se mettent en place pour prendre les légataires et leurs licornes dans un guet-apens aux abords de la rivière du tourment.
© Toussaint, Alvarez – Le Lombard
Ce deuxième épisode des Héricornes met donc en vedette Izandre. Elle veut prouver à sa patrie qu'elle est une digne héricorne. Pourtant, elle n'est pas arrivée là par hasard. Elle a quand même réussi une série d'épreuves physiques et intellectuelles, surclassant ses adversaires. Si sa famille croit en elle, elle-même est emplie de doutes. Mais avant de pouvoir prendre confiance en elle, elle va devoir apprendre à faire confiance aux autres. Si elle veut imposer Mû comme province puissante de Branévia, elle devra associer son intelligence et sa force à celles de ses camarades de voyage. Bref, elle doit apprendre l'esprit d'équipe. Lorsque les héritières vont invoquer leurs licornes, Izandre va faire une drôle de tête en voyant apparaître Kitalpha, un mini-cheval ailé pas plus haut qu'un poney. Peut-être grandira-t-elle au fur et à mesure que son héritière prendra confiance en elle ? En attendant, on peut parfois avoir besoin de quelqu'un de minuscule.
© Toussaint, Alvarez – Le Lombard
Après l'avoir présenté dans le premier tome, Kid Toussaint et Veronica Alvarez développent ce nouvel univers d'heroïc-fantasy. A priori, il semble que chaque volume sera principalement centré sur l'une des héricornes. Après Céleste, c'est donc Izandre qui se retrouve au premier plan. Les héricornes doivent lutter contre les orcons, des guerriers belliqueux n'ayant pas de territoire propre, mais dont certaines tribus se sont attribués des terres non revendiquées par d'autres royaumes. Toute ressemblance avec une situation géopolitique connue n'est peut-être pas fortuite. Ça peut sembler exagéré comme parallèle mais c'est avec des histoires comme celles-ci que l'on peut amener les jeunes lecteurs à se faire une opinion, à réfléchir, à s'interroger. Encore une fois, sous couvert de futilité (ceci dit sans aucune connotation péjorative), Kid Toussaint signe un scénario avec plus de fond qu'il n'y paraît. Ces divers niveaux de lecture n'empêchent pas le divertissement. La dessinatrice-coloriste Veronica Alvarez met du peps et du pop dans l'aventure, dans cette quête de soi sur le thème de l'adolescence, période complexe de transformation des âmes et des corps, où l'on comprend des choses, où l'on se forge une personnalité en devant faire face aux vents et marées.
© Toussaint, Alvarez – Le Lombard
Les héricornes sont en piste pour tracer leurs routes et celles de leurs lectrices et lecteurs. Ça sent le succès à bride abattue. Rien ne semble pouvoir les arrêter.
Laurent Lafourcade
Série : Les Héricornes
Tome : 2 – La digne héritière de Mû
Genre : Heroïc-Fantasy
Scénario : Kid Toussaint
Dessins & Couleurs : Veronica Alvarez
Éditeur : Le Lombard
ISBN : 9782808212380
Nombre de pages : 88
Prix : 12,95 €
"-Oscaaaaaar ?! Où est encore passé ce petit courant d'air ?
-Tu m'as appelé, maman ?
-Dis donc, toi ! Tu as disparu sans prévenir !
-C'est parce que j'étais avec ma copine Mitsuko !"
Oscar, le fils de la nouvelle boulangère du village de Klervi, a une bien drôle de fréquentation. Qui est cette amie Mitsuko avec qui il était ? Sa mère s'inquiétait. Il est tard. C'est l'heure du goûter et il a encore ses devoirs à faire. Mitsuko n'est pas très bavarde. La boulangère l'a aperçue en train de fouiller les poubelles d'en-face alors qu'elle vidait la sienne. Les habitants savent vaguement que c'est une petite orpheline. Sa mère n'était pas d'ici et son père serait Séraphin, le garde-forestier. Les gens la prennent pour une marginale. Toujours est-il qu'elle a des oreilles de renard et qu'une queue du même acabit sort de sa jupe fuchsia. Seul Oscar la considère. Il la fait rire et l'invite même à goûter dans sa cabane. Cependant, il ignore qu'elle a un secret.
© Clément, Leng - Delcourt
Neuvième conte des cœurs perdus signé Loïc Clément. Comme pour les précédents, le scénariste écrit une histoire tout en sensibilité, une ode à la tolérance et au vivre ensemble. Avec Mitsuko, il reprend le mythe de l'enfant de la forêt, faisant de la jeune femme une Huckleberry Finn au féminin. Elle fait des incursions en ville où la population ne veut pas trop d'elle. Elle habite une cabane dans les bois avec son père, veuf, un marginal qui n'arrive pas à communiquer avec elle. D'ailleurs, ses oreilles et sa queue de renard, est-ce un déguisement ou de réelles parties de son corps ?
C'est Anne Montel qui a fait découvrir à Loïc Clément le travail de Qin Leng, illustratrice et autrice d'albums pour enfants. Elle a beaucoup travaillé pour la télévision. Elle a illustré des livres, des magazines, réalisé des couvertures, pour des éditeurs du monde entier. Elle vit à Toronto. Séduite par le concept des Contes des cœurs perdus, elle a accepté de dessiner cette fable avec une grande délicatesse. C'est sa toute première bande dessinée, mais elle a déjà un nouveau projet de one shot en route avec Loïc Clément.
© Clément, Leng - Delcourt
Mitsuko est une histoire sur l'acceptation de la différence. Ce n'est pas parce que quelqu'un n'est pas comme nous qu'il faut s'en moquer, le chasser ou en avoir peur. Comme le montre la sublime couverture, Mitsuko est un récit de cassures, de brisures, qu'il faudra certainement recoller, au figuré comme au propre. Mitsuko est aussi une histoire sur le deuil, sur la communication pas toujours facile entre ceux qui restent. Entre tous les personnages, seul Oscar pourrait faire le lien, le fil de la vie, par son empathie, par son innocence, par sa simple présence. Souvent, c'est de l'enfance ou des enfants que viennent les solutions. Ha, aussi, il est question d'art dans cette histoire, d'art qu'on laisse en héritage, mais on ne peut en dire plus sans être trop indiscret. Juste que l'art, ça peut sauver des vies.
© Clément, Leng - Delcourt
Neuf albums et pas une fausse note. Les contes des cœurs perdus est une série d'anthologie remarquable par ses récits dont aucun ne ressemble à un autre mais où tous sont réunis par une grande humanité.
Laurent Lafourcade
Série : Les contes des cœurs perdus
Tome : 9 - Mitsuko
Genre : Fable poétique
Scénario : Loïc Clément
Dessins & Couleurs : Qin Leng
Éditeur : Delcourt
Collection : Jeunesse
ISBN : 9782413077404
Nombre de pages : 40
Prix : 11,50 €
"-Oui. Je chante ce soir au Kursaal de Klow… Vous plairait-il de m'entendre maintenant ?...
-Très volontiers…
-Ah ! Je ris de me voir si be-e-elle en ce miroir !... Est-ce toi Mar-gue-ri-te ?
-Heureusement, les vitres sont solides !..."
Lorsque Tintin monte dans la voiture de la Castafiore au beau milieu du Sceptre d'Ottokar, ni lui, ni Hergé, ni les lecteurs ne se doutaient qu'il venait de rencontrer celle qui deviendra l'un des personnages les plus mythiques du Neuvième Art. Après la biographie non autorisée signée Albert Algoud, Pierre Bénard, déjà auteur d'ouvrages sur Moulinsart et sur Tournesol, s'attaque à la cantatrice. Contrairement et complémentairement à la disgression humoristique d'Algoud, Bénard analyse objectivement la carrière et le caractère du rossignol milanais, "celle qui rit de se voir si belle" en son miroir.
© Bénard – 1000 sabords
"Casse-pieds émouvante, fléau secourable, grande artiste admirée, courtisée… et évitée", Pierre Bénard définit ainsi celle qui finalement apparaît seulement dans neuf albums, dont certains où elle fait des apparitions furtives. C'est dire si la Castafiore a une puissance hors du commun. C'est donc dans la forêt Syldave, au tout début de l'année 1939, que Tintin est amené par la Cadillac de la cantatrice de la Scala de Milan. Il n'y restera pas bien longtemps. Etourdi par son chant, il prétexte avoir oublié quelque chose dans une auberge pour se faire déposer.
© Bénard – 1000 sabords
L'auteur de l'essai compare ensuite cette rencontre avec celle faite par Tintin avec les autres personnages principaux de l'univers hergéen. On n'assiste pas à l'instant même du premier regard, ce qui laisse une impression un peu fabuleuse. La Castafiore "naît" dans la forêt, comme un personnage de conte.
Bianca ne peut se passer de chanter. C'est une boîte à musique. Bénard fait remarquer que l'air des bijoux du Faust de Gounod revient comme un écho d'album en album. Si la Castafiore ne peut pas être qualifiée d'affriolante, elle n'en reste pas moins femme, au moins en apparence ajoute l'exégète sans vraiment prendre position par rapport à la théorie d'Albert Algoud selon laquelle ce serait un homme. Lorsque Tintin la retrouve quelques pages plus loin, on assiste à l'une des scènes mythiques de la série où Tintin brise une verrière avant de tenter de prévenir le roi Muskar qu'un attentat se prépare.
La Castafiore reviendra donc épisodiquement dans les aventures de Tintin (et surtout dans les dernières) comme le fameux sparadrap du Capitaine Haddock qu'il n'arrive pas à se détacher des mains. Lequel Capitaine ne manquera pas d'imagination pour établir tout un tas de surnoms à la chanteuse, qui elle-même ne parvient jamais à dire correctement le patronyme du marin. Cataclysme, catastrophe ou autre cataplasme enfleuriront le patronyme de Bianca.
© Bénard – 1000 sabords
Dans une minutie impressionnante, Pierre Bénard se demande si elle est une fée ou une sorcière. Entre apparitions salutaires et mauvaises relations, Bianca gère sa carrière. Comment ne pas s'attarder sur cet album hors du temps qu'est Les bijoux de la Castafiore ? Le personnage explose en rayonnant dans le château. Elle y est mélodieuse et culottée. Igor, Irma, le ara, la pie, sont autant d'acteurs déterminants dans ce huis-clos qui fit figure d'album particulier dans la collection des aventures de Tintin. Bénard s'attarde ensuite entre autres sur les rapports entre la Castafiore et le Capitaine Haddock dans un chapitre judicieusement intitulé La signora Haddock. En conclusion, l'essayiste revient sur la personnalité multiple de cette Florence Foster Jenkins dessinée et termine avec une note d'émotion.
"Il faut absolument que je chante !" dit la Castafiore lors de sa dernière apparition officielle dans Tintin et les Picaros. Chantez, mais n'oubliez pas de lire. Quand on a fini de lire Tintin, on peut recommencer à lire Tintin. On y trouvera toujours quelque chose de nouveau.
Laurent Lafourcade
One shot : Bianca Castafiore Celle qui rit de se voir si belle
Genre : Ouvrage d'étude
Auteur : Pierre Bénard
Éditeur : 1000 sabords
ISBN : 9782494744158
Nombre de pages : 142
Prix : 15 €
"-Encore un p'tit dernier, collègue… Euh, comment tu t'appelles, déjà ?
-Fonce-Bouchure, pour vous servir !
-Approche, Fonche-Boussure, maintenant qu'on est cochons comme copains, j'vais te l'dire, mon secret… En Normandie, le 6 juin, va y avoir un grand ravalement, euh non, un grand chambardement, non, zut, euh…"
Mai 1944, à Bricourt-sur-patte en pleine occupation allemande, Fonce-Bouchure arrive à vélo au petit bar de Babette. Une voiture percluse de balles façon gruyère est stationnée devant l'établissement. Elle appartient à Diane, une aristocrate pomponnée, et sa petite troupe, dont Loïc, un ami de longue date, costard-cravate, diplomate au Quai d'Orsay. Après quelques verres de Pousse d'Epine, un nectar local, ce dernier dévoile qu'un événement va se produire le 6 juin en Normandie : les Alliés s'apprêtent à débarquer. "Mais chut, c'est un secret…" Un débarquement, depuis le temps qu'on l'attendait. Faut prévenir Maurice ! La fine équipe décide de filer un coup de main aux alliés. Direction la Normandie ! Il ne faudrait pas que ce traître de quincailler qui a tout entendu au comptoir prévienne l'ennemi.
© Coicault, Fraiscinet, David - CasaBD
La double bande, celle de Diane et la fine équipe, vont se diviser en deux. Une partie va partir avec la camionnette Citroën de Maurice pour faire sauter les ponts et ainsi empêcher les nazis d'avancer. Les autres vont rafistoler l'avion qu'ils ont piqué aux boches il y a trois ans. Il y a du boulot. Il est bancal et orné d'une Swastika. Opération bricolage et peinture en perspective, ce qui vaudra au moyen de transport une très originale couleur rose, ceci dit sans spoiler puisqu'on le voit en couverture.
Fred Coicault et Jean-Christian Fraiscinet poursuivent les aventures des personnages issus du spectacle éponyme de plein air joué chaque année, en juin, à la ferme théâtre de Bellevue, à Villentrois-Faverolles en Berry dans l'Indre, fresque humoristique sur la résistance. Le scénario écrit à quatre mains est mené tambour battant et l'histoire se lit à la vitesse des événements. La lecture s'accélère sans qu'on ne puisse rien y faire. C'est étonnant. On est en pleine immersion. La scène de l'avion de la fine équipe le Day-D est un grand moment d'action et d'humour comme on en fait peu. On se surprend à rire tout fort. Les dialogues sont finement écrits. Audiard n'aurait pas renié certains d'entre eux. L'émotion est également au rendez-vous lorsque la camionnette des dynamiteurs traverse le village dévasté d'Evrecy. Au dessin, Coicault est de ces dessinateurs au style franco-belge de la meilleure époque. Ça pulse.
© Coicault, Fraiscinet, David - CasaBD
La série est aussi un hommage à de grands films du cinéma français. Quand les "plastiqueurs" s'occupent de dynamiter les ponts, on ne peut s'empêcher de se remémorer à la réplique culte de La septième compagnie : "Le fil rouge sur le bouton rouge, le fil vert sur le bouton vert." Ici, elle n'y est pas, mais les protagonistes ne sont pas tout le temps plus adroits. Quand il est question de bouquet de marguerites, on aperçoit case suivante Fernandel et la justement nommée Marguerite de "La vache et le prisonnier". Il y a aussi Bourvil, tout droit sorti du Mur de l'Atlantique. Clin d'œil également à Charles Trenet, à Roch Voisine (incroyable !), ainsi qu'à Benny Hill dans une dynamique et dynamitée scène de poursuite comme on en voyait en fin de chaque épisode sur la musique Yakety Sax de Boots Randolph et James Rich.
© Coicault, Fraiscinet, David - CasaBD
A présent que la France se libère, on espère que La fine équipe n'a pas fini d'en découdre avec les troupes allemandes. Qui sait ? Peut-être qu'on les retrouvera quelques mois plus tard à la capitale ou bien en Allemagne au Nid d'Aigle ? En attendant, fêtons avec eux les quatre-vingt ans du débarquement.
Laurent Lafourcade
Série : La fine équipe
Tome : 2 – Débarquement à Juno Beach !
Scénario : Fred Coicault & Jean-Christian Fraiscinet
Dessins : Fred Coicault
Couleurs : Sophie David
Éditeur : CasaBD
ISBN : 9782380584837
Nombre de pages : 48
Prix : 15,95 €
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