« Cédric est un livreur de 42 ans. Il est marié et père de cinq enfants. Le vendredi 3 janvier 2020, il est arrêté pendant sa tournée à scooter par quatre policiers pour un contrôle, non loin de la Tour Eiffel. Le ton monte rapidement : Cédric est un homme qui en impose. Il décide de filmer les policiers. Quelques minutes plus tard, il est transporté en urgence à l’hôpital. Il y meurt moins de quarante-huit heures après. »
Ils s’appellent Cédric, Sofiane ou Maria. Ils ont été victimes de violences policières. Certains sont morts. D’autres en ont gardé des stigmates physiques ou psychologiques indélébiles. Ce ne sont pas forcément leurs vrais prénoms. L’auteur les a parfois modifiés parce que les instructions en justice sont en cours. Ces victimes, ça pourrait être vous, ça pourrait être moi, ça pourrait être n’importe qui. Remedium raconte leurs histoires, avec objectivité, dans un recueil poignant.
© Remedium - Stock
Un contrôle de pass sanitaire qui tourne mal, une manifestation qui dégénère, une interpellation qui part en vrille, les situations s’enchaînent dans des implacables sentences. Remedium montre une police qui s’acharne. L’auteur aurait pu choisir la facilité en racontant des histoires d’innocents injustement interpellés à cause de leurs origines ou de leurs couleurs de peau. Il en expose bien sûr, mais il cible aussi des délinquants sur qui les flics usent et abusent de leur statut. Arrêter un jeune qui tente de voler un scooter, d’accord. Mais pourquoi donc s’acharner sur lui à coups de pieds dans la tête ? Contrôler une manifestation, pas de problème. Mais pourquoi viser d’une grenade une mamie à sa fenêtre ? Remedium pose les questions, on pourrait dire, tout simplement.
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L’auteur alterne les séquences de violence ordinaire des policiers avec des cas connus qui ont été largement médiatisés. George Floyd étouffé sous le genou d’un flic raciste et sadique, Michel, le producteur de musique tabassé par un groupe de policiers dans son studio d’enregistrement à Bagneux dans les Hauts-de-Seine, ou encore Debora qui, parce qu’elle n’aura soi-disant pas mis correctement son masque, accouchera d’un enfant mort-né,… Voilà les dénonciateurs malgré eux d’actes inadmissibles. Il y a aussi des histoires improbables comme celle de cette libraire de Bagnolet, en quartier sensible, accusée de ne pas respecter les distanciations devant sa boutique pour que les clients viennent récupérer des livres en click and collect, ou encore celle d’une écolière de CM2, accusée d’apologie de terrorisme suite à un débat organisé par son maître d’école sur la liberté d’expression après l’assassinat de Samuel Paty.
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Alors qu’un certain ministre Jean-Michel avait son portrait dans Cas d’école, du même auteur, c’est un autre, nommé Gérald, qui se voit portraituré ici, un portrait encore moins reluisant que celui de son collègue de l’Education Nationale. Remedium termine quand même sur une petite note d’espoir, avec l’histoire d’Amar, brigadier-chef à la préfecture de police de Paris, placardisé, qui dénonce les exactions de certains de ses confrères et devient un lanceur d’alerte avec une vision optimiste, arguant que les actes dénoncés sont le fait de brebis galeuses.
Remedium signe un livre témoignage coup de poing, ce genre d’albums qui mettent le doigt là où ça fait mal et qui peuvent faire évoluer les mentalités.
Laurent Lafourcade
One shot : Cas de force majeure
Genre : Histoires de violences policières ordinaires
Scénario, Dessins & Couleurs : Remedium
Éditeur : Stock
Nombre de pages : 96
Prix : 18,50 €
ISBN : 9782234092990
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