José Suarez, guide touristique dans les haut-plateaux du Chili, est un homme sombre, rongé par un secret qui l'empêche de vivre et d'aimer. Sa rencontre avec Joan, une touriste américaine, va changer sa vie. Une aventure bouleversante au coeur des somptueux paysages d'un pays au passé douloureux.
Trois ans et demi après le très remarqué "Quelques jours ensemble", publié lui aussi dans la prestigieuse collection "Aire libre", on retrouve les signatures conjointes d'Alcante et de Fanny Montgermont sur une invitation au voyage dans les somptueux paysages du Chili. Voyage qui semble au départ simplement touristique pour Joan Johanson, une américaine au comportement fantasque que doit guider José Suarez. Voyage intérieur pour ce dernier, victime de la torture sous Pinochet et dont la douleur et la quête se dessinent au gré de nombreux flash-backs. Le terrible fardeau porté par Joan, lui, se révèlera seulement après une bonne cinquantaine de pages, insoupçonnable jusque-là, et surprenant totalement le lecteur. C'est cette drôle de rencontre entre deux êtres profondément blessés et, quelque part, en fuite, que nous racontent Alcante et Montgermont, une rencontre qui en appelle d'autres, parsemées de regards, de petites phrases (sublîme visite de l'atelier du peintre...) qui amèneront finalement les deux personnages principaux à prendre chacun le chemin vers la reconstruction de leur être. Le dessin de Fanny Montgermont a encore évolué depuis "Quelques jours ensemble" et colle parfaitement au scénario très sensible et tout en retenue d'Alcante, en excellant notamment à traduire des sentiments à travers un regard ou l'esquisse d'un sourire. Les splendides paysages chiliens, qui sont bien plus qu'un décor, offrent à la dessinatrice l'occasion de nous délivrer quelques pleines pages et même une double page à couper le souffle. Mention spéciale également à la scène des flamants roses, où souffle un beau vent de liberté et d'une rare poésie.
Alcante (Didier Swysen de son vrai nom) distille son histoire par petites touches sensibles, campant des personnages blessés, profondément humains et à la croisée de leurs chemins. Joan et José fuient chacun leur passé. Leur rencontre les amènera à le surmonter. Des qualités déjà bien présentes dans l'écriture de "Quelques jours ensemble" et encore affinées dans ce Clair-obscur dans la Vallée de la Lune. Une rencontre rédemptrice dans les grands espaces qui donne, en tous cas, naissance à un très bel album qui s'inscrira sans doute sans difficulté parmi les grands moments BD de cette année 2012.
Pierre Burssens
Clair-obscur dans la Vallée de la Lune, 64 pages, collection Aire Libre 15,50 € édité chez Dupuis.
1897. Dans le port d’Anvers, on charge et on décharge les vapeurs qui « font le Congo ». Cargaisons d’ivoire et de caoutchouc d’un côté, d’armes et de chaînes de l’autre… Car en dépit du nom officiel de cette lointaine possession africaine – E.I.C., pour Etat Indépendant du Congo –, c’est bien le Roi Léopold II qui en est l’unique propriétaire légal. Et sa consigne est claire : rentabiliser au mieux et au plus vite cette immense colonie, quitte à y faire régner l’arbitraire le plus absolu. Loin des regards, un quasi esclavage est imposé aux populations locales, comme l’a constaté depuis sa récente arrivée au Kivu le jeune missionnaire Paul Delisle. En dépit des discours « civilisateurs », éducation et évangélisation ne sont décidément pas les priorités du tyran de Bruxelles…
La série n’a de « rêves » que le nom. En effet, comme le précise le titre de ce second volume « Dix volontaires sont arrivés enchaînés », les scénaristes (J.F Charles & Maryse) optent vers une narration privilégiant le coté historique au travers du regard de Paul Delisle.
Ce missionnaire, envoyé en Afrique, découvre les exactions commises sur les populations locales au profit du principal propriétaire de l’Etat Indépendant du Congo (E.I.C) avec la complicité des religieux présents au service des autorités. Le journaliste Edmund Dene Morel ainsi que le diplomate Casement prenant connaissance des agissements horribles effectués sur les autochtones dénoncent ceux-ci à l’opinion internationale. L’exploitation des ressources de l’E.I.C a permit de fournir l’industrie automobile naissante en caoutchouc (culture des hévéas) mais aussi a rapporté au roi bâtisseur un rendement frôlant parfois les 500 %. Mais à quel prix ? Les populations indigènes étaient soumises aux mauvais traitements, l’esclavagisme, la malnutrition mais aussi de nombreuses mutilations « mains coupées » sans compter les nombreux décès dus aux maladies.
Léopold profiteras de cette fortune amassée afin d’ériger de nombreux sites tels que le tracé des avenues de Tervueren et Louise, la création des serres royales à Laeken, du parc et des arcades du cinquantenaire à Bruxelles, transformé la ville d’Ostende en y construisant l’hippodrome et les galeries royales située sur la digue mais aussi constitué un important domaine en Ardenne comprenant les châteaux de Ciergnon, Fenffe, Villers-sur-Lesse et Ferage. Il possède aussi deux domaines sur la Côte d’Azur.
L’ensemble brillamment illustré par Frédéric Bihel privilégie le réalisme par rapport à la ligne claire. Les couleurs et paysages sont superbes. Un très bon moment de lecture historique pour un public composé essentiellement d’adultes mais aussi d’adolescents. Je vous invite à lire le texte ci-dessous avant d’entamer la lecture des deux premiers volumes d’Africa Dreams.
Révérends Pères et chers compatriotes,
La tâche qui vous est confiée à remplir est très délicate et demande beaucoup de tact. Prêtres, vous allez certes pour évangélisation, mais cette évangélisation doit s'inspirer avant tout des intérêts de la Belgique et de l'Europe.
Le but principal de votre mission en Afrique n'est donc point d'apprendre aux nègres à connaître Dieu, car ils le connaissent déjà. Ils parlent et se soumettent à un Mundi, un'Mungu, un Diakomba et que sais-je encore; ils savent que tuer, voler, coucher la femme d'autrui, calomnier et injurier est mauvais. Ayons donc le courage de l'avouer. Vous n'irez donc pas leur apprendre ce qu'ils savent déjà. Votre rôle essentiel est de faciliter la tâche aux administratifs et aux industriels. C'est donc dire que vous interprétez l'évangile de façon qui sert à mieux protéger nos intérêts dans cette partie du monde.
Pour ce faire, vous veillerez entre autres à désintéresser nos sauvages des richesses dont regorgent leur sol et sous-sol, pour éviter qu'ils s'y intéressent, qu'ils ne nous fassent pas une concurrence meurtrière et rêvent un jour à nous déloger. Votre connaissance de l'Évangile nous permettra de trouver facilement des textes recommandant aux fidèles d'aimer la pauvreté, tel par exemple : " heureux les pauvres car le Royaume des cieux est eux ", " Il est difficile aux riches d'entrer au ciel ". Vous ferez tout pour que les Nègres aient peur de s'enrichir pour mériter le ciel. Pour éviter qu'ils ne se révoltent de temps en temps et pour que vous les fassiez craindre, vous devez recourir à la violence. Vous leur enseignerez de tout supporter même s'ils sont injuriés ou battus par vos compatriotes administratifs. Vous leur enseignerez que toute personne qui recourt à la vengeance n'est pas digne d'être fils de Dieu. Vous les inviterez à suivre l'exemple des Saints qui ont tendu la deuxième joue sans recul et insulte. Vous devez les détacher et les faire mépriser tout ce qui leur procure le courage de nous affronter. Je fais allusion ici principalement à leurs fétiches de guerre. Qu'ils ne prétendent point les abandonner et vous mettre tous à l'œuvre pour les faire disparaître. Votre action doit se porter essentiellement sur les jeunes afin qu'ils ne se révoltent pas. Si le commandement du Père est conducteur à celui des parents, l'enfant devra apprendre à obéir à ce que lui recommande le missionnaire qui est le père de son âme. Insistez particulièrement sur la soumission et l'obéissance. Évitez de développer l'esprit de critique dans vos écoles. Apprenez aux élèves à écrire et non à raisonner. Ce sont là, chers compatriotes, quelques-uns des principes que vous appliquerez. Vous en trouverez beaucoup d'autres dans les livres qui vous seront remis à la fin de cette séance. Évangélisez les Nègres à la mode des Africains, qu'ils restent toujours soumis aux colonialistes blancs. Qu'ils ne se révoltent jamais contre les injustices que ceux-ci leur font subir. Faites leur méditer chaque jour " heureux ceux qui pleurent car le Royaume des cieux est à eux ". Convertissez toujours des Noirs au moyen de la chicote. Gardez leurs femmes à la soumission pendant neuf mois afin qu'elles travaillent gratuitement pour vous. Exigez ensuite qu'ils vous offrent en signe de reconnaissance des chèvres, poules, œufs, chaque fois que vous visitez leurs villages. Faites tout pour éviter que les Noirs ne deviennent jamais riches. Chantez chaque jour qu'il est impossible à un riche d'entrer au ciel. Faites-leur payer une taxe chaque semaine à la messe de dimanche. Utilisez ensuite cet argent prétendument destiné aux pauvres et transférez ainsi vos missions à des centres commerciaux florissants. Instituez pour eux un système de confession qui fera de vous de bons détectives pour démentir tout Noir qui a une prise de conscience envers les autorités investies du pouvoir de décision.
Léopold II, Roi de Belgique
(Discours prononcé en 1883 devant les missionnaires se rendant en Afrique)
A la demande de sa petite fille, Dounia va lui raconter son parcours de vie allant de 1940 à la fin de la deuxième guerre mondiale.
L'histoire de Dounia commence avant le port de l'étoile. Elle raconte comment ses parents lui ont expliqué l'obligation de porter l'étoile. Un petit mensonge pour la protéger mais qui sera vite éventé par la petite Dounia. A travers son parcours, elle explique la montée de l'humiliation et l'évolution des mentalités de ses camarades de classe et des enseignants. Cela aboutira à l'abandon de l'école.Après cela, la situation va s'aggraver. Une nuit, la milice vient les arrêter. Le père de Dounia a le temps de cacher sa fille dans le double fond d'une armoire. Ensuite, la petite fille devra fuir constamment.
A travers des mots simples, la grand-mère tente d'expliquer à sa petite fille une page d'histoire qui est aussi un peu la sienne...
Parmi les nombreux albums consacrés à la seconde guerre mondiale et à la shoah fin 2011 et début de cette année, « L'Enfant cachée » occupe une place bien particulière. En effet, il est véritablement destiné à un public « de 7 à 77 ans » (et plus) et par cette vision de cette tragédie à travers les yeux d'un enfant, il ne peut qu'aller droit au coeur. Impossible, en effet, de rester insensible au destin de Dounia, d'abord victime des discriminations et humiliations dans sa propre école avant d'être dissimulée dans une garde-robe à double fond alors que l'on vient arrêter ses parents lors de ce que l'on appellera la « rafle du vel'd'hiv' ». Dounia est ensuite prise en charge par une chaîne de solidarité et de résistance avant de retrouver une vie plus « normale » dans une ferme... Et c'est également l'existence de tels mouvements qui est ici mise en lumière, des réseaux qui permirent de sauver 84 % des enfants juifs de France. L'homme est capable du pire comme du meilleur et cette dualité est encore une fois bien présente. En découvrant « l'enfant cachée », on a la sensation de lire une histoire toute simple, mais ce n'est qu'une apparence puisque nous, adultes, connaissons sa véritable résonance. Hors contexte, on saluera aussi le travail des auteurs qui resituent plus généralement la perception que les enfants peuvent avoir de leur vécu. Une histoire toute simple et terrible extraordinairement mise en images par le dessin touchant de Marc Lizano, qui excelle à retranscrire les interrogations de Dounia autant que de merveilleux moments de tendresse. C'est donc sans conteste sous le signe de la mémoire mais aussi de l'émotion qu'est placé cet album hors normes qui a donné lieu à une exposition réalisée en collaboration avec l'ajpn (anonymes, justes et persécutéss durant la période nazie) dévoilée à Angoulême et destinée à circuler dans les écoles en France.
Une BD hors du commun, un must... et pas seulement pour les enfants !
Pierre Burssens
L'enfant cachée, 80 pages, 16.45 € édité chez Lombard.
Tout le monde connaît Mary Shelley grâce à son célèbre roman Frankenstein. Mais qui se rappelle des frasques de sa jeunesse ? De la vie débridée du poète Percy Bysshe Shelley, qui lui offrit son nom et qui demeure pour les Anglais beaucoup plus célèbre qu'elle ? Ou encore de la vie incroyablement intense que mena leur ami Lord Byron, le plus grand poète que l'Angleterre ait jamais connu ? Si ces trois-là ont donné leurs lettres de noblesse à la littérature romantique anglaise du début du XIXe siècle, il ne faut pas oublier que les destinées de ces immenses poètes furent encore plus exaltées que leurs écrits.
Il est étonnant de constater combien la littérature anglaise, derrière ses écrits, compte de « personnages » dont les vies auraient elles-même pu donner lieu à des romans. Lewis Carrol, James M. Barrie ou encore ceux que l'on retrouve dans le premier volet de « Shelley », diptyque de Daniel Casanave et David Vandermeulen sont de ceux-là. Percy Bysshe Shelley n'invite-t'il ceux qu'il rencontre à « vivre leurs vies comme un roman » ? Et on se laisse très vite entraîner par cet écrivain et poète fantasque et insouciant, au gré de ses aventures littéraires et amoureuses, dans une existence très éloignée des conventions sociales de son époque et qui le fit à la fois haïr et aduler. S'attaquer à un tel sujet était risqué.
Il aurait en effet été facile de tomber dans une évocation purement biographique, lourde et surchargée de textes et de références. David Vandermeulen évite cet écueil en nous livrant un portrait léger et immédiatement accrocheur. On se place dans les pas de Percy, on rit de ses excès et de ses provocations comme on est touché par sa sensibilité, et on ne s'ennuie pas une seconde tout au long de cet album. Très typé « bd moderne », le dessin de Daniel Casanave répond merveilleusement au scénario par son dynamisme et son mouvement, sans oublier quelques cases particulièrement belles qui ne peuvent qu'évoquer, sous un trait pourtant très actuel, les gravures de l 'époque. La physionomie de certains personnages est amusante dès le premier coup d'oeil, on se régale ensuite de leur expressivité. Après avoir lu cet album, il est d'ailleurs très difficile de l'imaginer avec un autre dessin, tant l'alchimie scénario/images fonctionne bien. Sur un sujet inattendu, et loin de tout esprit « cours de littérature », c'est une petite perle que l'on découvre là, dans un bien bel écrin qui plus est, puisque c'est dans un petit mais séduisant format 20 x 27 cm que se décline « Percy ». Le second volet, « Mary », plutôt dédié à l'auteure de « Frankenstein » est annoncé pour le printemps. Sans avoir à « vivre sa vie comme un roman », les albums dont on sort un rien plus cultivé, léger et peut-être même un peu plus heureux ne pullulent pas dans les vitrines des libraires ces temps-ci. Ce premier « Shelley » en fait assurément partie. Vivement le printemps !
Pierre Burssens
Shelley "Percy" tome1 par Casanave & Vandermeulen, 72 pages au prix de 14.99 € édité par Lombard. Sortie le 10 février 2012
Née dans les pages du périodique Spirou en mars 1965, Sibylline est un délicieux personnage de petite souris évoluant dans un univers champêtre, et vivant des aventures pleines de fantaisie.
Elle est environnée d’une ribambelle de seconds rôles pittoresques et attachants, et a pour adversaire le rat noir Anathème.
Cette édition définitive fait l’objet d’un travail très soigné de restauration des planches, afin de leur redonner la chaleur des couleurs vintage.
Raymond Macherot est un personnage mythique de la bande dessinée franco-belge et les éditions Casterman ont eu l'excellente initiative de publier en 5 volumes l'intégralité de la collection des album de Sybilline, la petite souris créée par l'un des grands maître belge du neuvième art. Cette deuxième intégrale s'ouvre sur un livret de 12 pages avec de très intéressante anecdote. Celle de la préparation de l'arrivée de Macherot dans le journal de Spirou, alors qu'il fut un résident permanent chez Tintin par des auteurs aussi emblématique tels que Franquin, Morris, Lambil, Mitacq pour ne citer qu'eux entre autres ou celle, ou Yvan Delporte apporte un Lionceau à la rédacteur qui ne manque pas de mordre Le sieur Raymond constitue le lot de trésors contenu dans cette introduction. S'en suivent des photographies, images et extrait de couvertures ou d'illustration aussi savoureuses les unes que les autres.
Ensuite, nous découvrons ou redécouvrons des récits écrits par Yvan Delporte avec des planches ou l'éditeur à le bon ton de s'excuser de la qualité moyenne des scans, ce qui est tout à son honneur. Pour enchaîner ensuite 9 titres des aventures de cette touchante petite souris dessinée avec grand talent par un grand monsieur dont Herger disait lui-même " Raymond Macherot est l'égal de Walt Disney dans sa manière de camper le caractère des animaux."
C'est sans nul doute, l'une des séries d’intégrale culte que l'on se doit de posséder dans sa bédéthèque si l'ont est un amateur de neuvième art avertit ou un amateur de bon goût.
Aurélien Garance
Intégrale Sybilline 1969-1974
Auteur : Raymond Macherot
Collection : Univers d'auteurs
Serie : Intégrale Sibylline
Tome : 2
Pages : 200
Prix : 25,00 €
Belgique, nuit du 12 au 13 novembre 1943, quelque part entre Malines et Louvain.
Un convoi de wagons plombés s’est immobilisé sur la voie ferrée. Il vient de quitter Bruxelles, direction Auschwitz. À son bord, parmi des milliers d’autres, une jeune femme, Olya Van Horn, juive allemande jusqu’alors réfugiée en Belgique. Elle se remémore la longue suite d’événements tragiques qui, depuis sa ville natale d’Hambourg dix ans auparavant, l’a finalement conduite dans ce sinistre convoi…
Scénario signé Toussaint et illustré par J.M Beroy, nos deux complices décrivent au moyen de différents flashback la montée de l'anti- sémitisme et du racisme vis à vis de la population Juive dans l'Allemagne des années 30. Le tout est représenté sans voyeurisme et avec le trait réaliste et touchant de Beroy. Que dire de l'histoire d'amour débutante entre cette jeune juive (Olya) et ce jeune allemand (Wilhem) ,enrôlé de force dans les jeunesses nazie par son père, ayant comme passion commune la lecture. A lire absolument la préface signée Simon Gronowski avant de débuter la lecture de cette BD criante de vérité a se procurer sans délai !
L’histoire s’inspire d’un épisode authentique de la Seconde Guerre mondiale en Belgique. Dans la nuit du 19 au 20 avril 1943, le convoi numéro 20 chargé de 1631 déportés juifs de tous âges est immobilisé en pleine campagne (voie Malines-Louvain) grâce à un feu rouge factice fabriqué au moyen d'une lanterne et d'un papier journal de couleur rouge. Pour la première fois, les wagons de troisième classe sont remplacés par des wagons avec de petite fenêtre couverte de fil de fer barbelé. Alors que le convoi est gardé par un officier et quinze hommes , trois jeunes étudiants (Youra Livschitz, Robert Maistriau et Jean Franklemon) armé d'un pistolet et de sept cartouches en profitent pour ouvrir un wagon. Profitant du chaos, 231 personnes s'enfuient: 90 Juifs ont été repris et envoyés sur d'autres convois, 26 autres ont été tués par les gardes de la Schutzpolizei et 115 réussissent à s'évader. Le plus jeune (Simon Gronowski) avait seulement 11 ans. Lors de l'arrivée du convoi numéro 20 à Auschwitz le 22 avril 1943, la première sélection retient 521 personnes (150 d'entre eux survivront à la guerre), les 1031 autres disparaîtront directement dans l'holocauste. C’est le seul convoi de juifs envoyés en déportation qui a été attaqué ! Une stèle commémorative a été inaugurée en 1993 près de la gare de Boortmeerbeek afin de commémorer le souvenir de cet évènement.
En 1940, près de 70.000 juifs vivaient en Belgique. 36% d'entre eux ont été déportés depuis le camp de formation de Dossin situé près de Malines. De l'été 1942 jusqu'en 1944, vingt-huit transports ont quittés la Belgique pour emporter 25.257 Juifs (5.093 enfants inclus) et 351 gitans en Europe de l'Est (Destination finale --> Auschwitz). Seulement 1.205 personnes survivront à cette déportation.
Niala S.
Délaissé depuis quelques années pour cause de travaux sur les albums de Natacha et autres nombreuse tâches, le vieux bleu semblait faire l'objet d'une arlésienne à répétition et souffrait par conséquent du manque de temps que pouvait lui accorder François Walthéry.
Le scénario du tome 2 avait été écrit depuis le début des années 80 par Raoul Cauvin.
Il débute avec le décès d'un colombophile nommé Joseph. Dans sa collection il possédait un oiseau de grande valeur. Tous le voisinage et surtout les colombophiles sont sur le coup et souhaitent acquérir le pigeon du défunt.
Lettre à François
30 ans d'attente pour que le vieux bleu regagne son pigeonnier afin de nous conter la suite de ses aventures. (Perpétuité en jargon judiciaire !) Enfin, le second tome est tombé dans les bacs de toutes les bonnes librairies. 24 nouvelles planches ou rien n'est à jeter ! Un scénario étonnant signé CAUVIN qui va séduire le lecteur par son dénouement inattendu. (Cauvin qui avoue lui-même à demi mots ne plus très bien se souvenir de son déroulement au vu de la date à laquelle il te l’a transmis) Comme tu le signale toi-même dans le livre, certaines femmes t’on accaparé une grande partie de ton temps (on parle souvent d’une hôtesse de l’air). D’autres mauvaises langues parlent soit d’un poil dans la main ou d’œufs sous les bras ! Mais miracle, le livre est enfin disponible.
Je me rappelle avoir offert au début de mon adolescence (1981) le premier tome des aventures de Jules et du vieux bleu à mon père colombophile. Celui ci avait énormément apprécié la BD et attendait avec impatience la suite des aventures !
Malheureusement, comme une grande partie de tes lecteurs colombophile, il est partis rejoindre l'autre coté de la rive de la vie et ne connaîtra jamais cette suite (sauf si tu as pensé à envoyer quelques exemplaires la haut !).
Pour terminer, il est des œuvres dont on ne peut attribuer une note et je considère ce second tome en faisant partie ! J’encourage vivement les lecteurs ne connaissant pas l’univers magique et tellement réel de Jules et de son vieux bleu à se procurer au plus vite le premier tome.
Te donne rendez vous en 2041 afin de connaître la réaction de Jules face à l’occupant Allemand lorsque celui-ci sera obligé à contre cœur de se séparer de son colombier.
Niala S.
Pour l'anniversaire d'une préadolescente complètement fashion victime, que peut-on trouver de mieux qu'un hamster siglé "Mattonvu" ? Rien. Surtout que Britney Spears, elle-même, a un hamster ! Le père d'Amandarine n'a donc pas d'autre choix que de commander l'animal à "La Fabrique", une entreprise spécialisée dans la création d'animaux de compagnie sur mesure. Mais, suite à un dysfonctionnement dans la chaîne de fabrication, la mignonne petite bête attendue laisse la place à une sorte de rat extrêmement laid, franchement malodorant, aussi sournois que méchant et d'une grossièreté sans limite.
Qui a dit qu'on inventait plus rien en BD, que tout avait déjà été fait ? Avec ce premier album de « Sale bête », Mazaurette et Krassinsky frappent très très fort. Imaginez « Bestiole », que vous aussi vous finirez pourtant par adopter, le « héros » de cette histoire : croisement entre un hamster, Alien et parfois -mais plutôt rarement- Calimero, le tout avec un caractère (et une odeur) de cochon ! Les catastrophes domestiques dont il est la source sont à l'aune de cette description. Et pourtant, je vous le jure, on s'attache peu à peu à cette boule puante et à son drôle de parcours en compagnie des « ratés » de la Fabrique. Voilà pour le premier degré. Second degré, tout le background satyrique de cette histoire.
La famille au bord de la déglingue qui accueille Bestiole, les soeurs si dissemblables (Elisabelle et Amandarine, ah, rien que ces prénoms), le père qui fonctionne aux grandes théories et combine ça avec une fonction « d'homme au foyer », mais pour ce qui est de la pratique, euh... On y ajoutera un homme politique qui n'est pas sans rappeler physiquement un financier-industriel-président de club de foot-acteur et qui instrumentalise la cause animale (parmi d'autres on s'en doute). Troisième degré, autre satyre, celle d'une société de consommation du « tout-formaté », y compris pour ses animaux domestiques...et qui déraille parfois, heureusement, puisque c'est grâce à cela que Bestiole et cet album ont vu le jour ! Après Arthur de Pins, c'est sa scénariste sur « Péchés Mignons » qui aborde Spirou magazine et la BD grand public, par le biais de cette véritable petite bombe d'humour caustique. Elle retrouve au dessin Jean-Paul Krassinsky avec qui elle avait déjà collaboré à l'occasion d'une des « fables de la poubelle ». Une association qui s'avère détonnante, le trait aigu de l'un servant à merveille l'histoire acide de l'autre. Retrouver cet album gentiment trash sous l'étiquette du grand éditeur marcinellois et pré-publié dans Spirou Magazine constitue une autre surprise, mais certaines incursions de celui-ci vers un humour « différent » ont été joliment accueillies (les Nombrils, le Royaume, Zombillenium...). Le tout sera de transformer l'essai du premier album vers la série en conservant (au moins) le niveau de ce « Hamster Drame » qui, vous l'aurez compris, constitue déjà un de mes coups de coeur 2012 !
Sâle Bête, tome 1 "Hamster Drame" 56 pages, 10,45 € édité chez Dupuis, sortie le 27 janvier 2012.
Les parents d'Ana ne lui ont jamais parlé de leur jeunesse en Europe, comme si leur vie n'avait commencé qu'à leur arrivée en Argentine. Partie faire ses études en France, Ana ne comprend pas pourquoi elle n'arrive à y retrouver aucune archive familiale. Un jour, sa mère vient lui rendre visite, et lui lit un récit semblable à celui de l'Écharde...
"La Corde" est la suite de "l'Écharde", best-seller de la collection "Secrets".
Avec ce deuxième tome de « la Corde », Annette et Ana parviennent enfin à lever les « secrets » de famille sur lesquels est basé le concept de cette série très particulière imaginée par Franck Giroud et inaugurée graphiquement par Marianne Duvivier et « l'Echarde ». Ici les secrets se dissipent, mais au terme d'une douloureuse enquête sur une autre réalité de la seconde guerre mondiale et de la déportation. Des camps de concentration à une autre forme d' « épuration » qui a suivi, stigmatisant ces femmes ayant « fauté » avec l'ennemi et ces « enfants de boches », l'itinéraire découvert et indirectement parcouru par ces héroïnes malgré elles, à travers des témoignages, des rencontres, s'avère certes éprouvant mais combien émouvant. Encore une fois, et c'est le trait principal de la série, « l'humain » prend toute sa dimension et on y adhère d'autant plus facilement. On peut aimer ou pas le dessin de Marianne Duvivier, mais une fois la lecture entamée, on mesure à quel point il sert avec justesse le propos du scénariste. A travers de nombreux gros plans sur les visages, des jeux de regards, il excelle à transcrire les émotions et les sentiments ainsi que la belle complicité qui se renforce entre Ana et Annette, liées par l'Hisoire et le destin. Mention spéciale aussi au formidable travail de Bertrand Denoulet sur les couleurs. Non seulement celles-ci soutiennent de très belle manière le dessin, mais par les différentes ambiances qu'elles installent elles contribuent véritablement au déroulement de cette histoire. Avec ce tome 2, c'est plus qu'un dyptique qui s'achève, mais bien un cycle de 4 albums qui s'installe comme la pierre angulaire d'une « série » unique dans l'univers de la BD. Les albums ayant pour cadre la seconde guerre mondiale n'ont pas manqué en 2011, déclinant des approches différentes. Certains se sont hissés au rang de franches réussites. Celui-ci les rejoint sans conteste pour son côté sensible, humain, mais aussi une forme de pudeur ou de réserve paradoxalement très évocative. Utile !
Pierre Burssens
Secrets, La corde, Tome 2, Dupuis.
Plus qu'un point cardinal, plus qu'une direction...L'OUEST. Un cow-boy traverse ces contrées arides en chantant le célèbre " i'm poor lonesome cow-boy". Ce cavalier solitaire se nomme Sam. Sur sa route, il découvre une caravane renversée sur le flanc, détruite, la fumée qui s'en dégage encore témoigne de la violence du combat qui s'est déroulé. Il n'y a plus rien à faire et il ne peut que constater le drame qui vient de se produire et passer son chemin quand Soudain... il entend un cri strident, le pleur d'un enfant, caché certainement dans les rocher par ses parents durant l'attaque. Sam s'empare du bébé et décide de l'amener chez le Shérif de Nothing Gulch qui ne saura trop quoi en faire de ce petit braillard. C'est finalement Martha, la tenancière du saloon qui se chargera du petit. Il lui donnerons le prénom de Luke...surnommé, Luke le chanceux.
La genèse d'un géant de l'ouest
Suivre les aventures d'un personnage aussi célèbre que celui de Lucky Luke est déjà un plaisir immense en soi. Découvrir les origines de ce cow-boy solitaire en est un autre tout aussi savoureux. Vous en rêviez ? Le dessinateur et scénariste Achdé l'a réalisé pour vous avec brio. Une approche de la jeunesse de Lucky Luke avait déjà été faite par Morris, Leturgie & Pearce grâce à l'album Oklahoma Jim. Depuis lors plus rien n'avait été tenté ou envisagé. C'est donc chose faite en cette année 2011. Achdé nous offre avec son trait fidèle à celui de Morris, cette genèse du petit cow-boy facétieux sous forme de gags en une page. Ce petit cow-boy en herbe qui rappellons-le, tire avec sa catapulte plus vite que son ombre. Nous faisons aussi la connaissance des petits camarades de Kid Lucky, ajoutant à cet album la fraîcheur que l'on est en droit d'attendre dans ce genre de bande dessinée qui prend le thème de la "jeunesse de" très à la mode ces derniers mois. Kid Lucky, c'est de l'humour omniprésent, distillé à bonne dose et qui vous fera remuer quelques fois les zygomatiques. En guise de supplément, vous trouverez en bas de page des anecdotes en une phrase sur le monde du far west écrite sur un ton frivole mais intéressantes pour la culture générale. Vous ne serez donc ni déçu par les gags, ni par le graphisme efficace d'Achdé. Un premier tome qui démarre sur les chapeaux de roue et qui se destine à tout public. Le bon plan en guise de cadeau de noël ou tout simplement pour se faire plaisir.
Aurélien Garance
Kid Lucky, l'apprenti Cow-Boy, 46 pages, Lucky Comics.
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