« - Irena Sendlerowa ?
- C’est moi.
- Signez-moi cette décharge et je vous laisse les gamins.
- Ils ont mangé ?
- On n’a pas pris le risque de leur donner quoi que ce soit. Trop de déportés sont morts d’indigestion quand on les a nourris. On vous les amène directement d’Auschwitz-Birkenau et on repart.
- Bonjour mes petits chéris. Je m’appelle Irena , et avec mes camarades on va bien s’occuper de vous.
- Madame… Je peux te poser une question ?
- Bien sûr mon grand.
- Pourquoi nous on est vivants alors que tout le monde dans le camp ils sont morts ?
- Parce que tu as eu de la chance. Il ne faut jamais se sentir coupable d’avoir survécu, tu sais. Faites-moi confiance, à partir de maintenant, tout va aller de mieux en mieux. »
1983. Après avoir planté un arbre sur la colline de Jérusalem, Irena se rend à Haïfa en voiture. Sur la route, les souvenirs remontent à sa mémoire. Des enfants dont les regards la hantent à la culpabilité de ne pas en avoir fait assez, Irena revient sur des moments de guerre et sur des instants d’après dans une Pologne complexe et dure.
« La vie, après ». Ce titre, coupé par une virgule comme un caillou sur lequel on trébuche sans pour autant tomber, montre combien il a été difficile de se reconstruire après la Seconde Guerre Mondiale. On apprendra que, pour Irena comme pour tant d’autres, ce ne sont pas des jours roses qui ont succédé aux jours noirs, même si le ciel s’était éclairci.
On a tout dit dans ces colonnes sur cette série et ses auteurs. Cet ultime épisode réunit toutes les qualités des précédents : aventure, émotion, tragédie et espoir. Avec la scène des enfants qui racontent leurs cicatrices en dessins, les auteurs poussent le concept consistant à raconter une histoire dramatique avec un graphisme enfantin, dans le sens noble du terme, comme une mise en abime. Quand Irena raconte le destin de Janusz Korczak et de sa « République des enfants », personne ne pourra retenir une larme lors de l’envol du train de Treblinka vers cette étoile qui brille et se reflète dans la mer.
La série se termine sur la rencontre entre Irena et Marek Halter, qui préface ce cinquième volume. Le cinéaste et romancier polonais recueillait des témoignages pour un documentaire de 2h 30 sorti en 1994 intitulé Les Justes.
En voici la bande-annonce :
Nominée pour le prix Nobel de la paix en 2007, Irena ne l’obtient pas, au profit d’Al Gore, alertant sur l’évolution du climat. Elle mourra l’année suivante. Ce prix, elle le mérite tant qu’il n’est même pas concevable qu’on puisse se demander si seulement elle en aurait été légitime. Alors, si le jury du Nobel est passé à côté, le jury des lecteurs de cette extraordinaire série le lui attribue à l’unanimité.
Parce que c’est une œuvre de mémoire, parce qu’on ne ressort pas indemne de sa lecture, et de par son sujet, son type de narration et son graphisme, Irena, cinq volumes scénarisés par Jean-David Morvan et Séverine Tréfouël, dessinés par David Evrard et colorisés par Walter, est et restera la plus grande série des années 2010-2020.
Laurent Lafourcade
Série : Irena
Tome : 5 - La vie après
Genre : Drame historique
Scénario : Morvan & Tréfouël
Dessins : Evrard
Couleurs : Walter
Éditeur : Glénat
Nombre de pages : 72
Prix : 14,95 €
ISBN : 9782344033036
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