Depuis le Moyen-Âge, Rocamadour, baigné par l'Alzou, est un haut lieu de pélérinage, une étape sur le chemin de la lointaine Saint-Jacques de Compostelle. Cette débauche d'églises construites au cours des siècles sous le regard bienveillant de la Vierge Noire inspirent le respect et pourraient même susciter des vocations. Pour le profane Rocamadour est aujourd'hui un point de passage qui ne le laissera pas insensible, un rendez-vous unique, une parenthèse en dehors du temps.

Pourtant, parfois, le vent rageur de l'hiver claque de sa main glacée les volets du château et couvre de son murmure les ave maria grinçant des moines du monatère...

Dehors, la neige couche son manteau blanc. Le décor est posé... l'enquête peut commencer.

Le village de Rocamadour ets, depuis quelques jours témoin de meurtres étranges et inexpliquées : un meurtrier fantôme décapite ses victimes sans laisser de traces si ce ne sont, occasionnellement, celles d'un loup.

Inutile de dire que l'impression de sérénité dégagée par le village s'en trouve fortement altérée...

Ce contexte est propice à mettre en branle la brigade de l'étrange, spécialisée dans l'affrontement des forces du mal, championne dans la résolution des énigmes complexes, lugubres et "fantastiques".

Voici le genre de BD qui ne laisse pas indifférent. On aime ou on n'aime pas !

Commençons par le mauvais côté : si le trait de Frédéric Marniquet n'est pas sans évoquer une certaine ligne claire, il n'en reste pas moins que la simplicité de celle-ci donne un côté grossier voire limite hideux aux personnages. Avant même que l'histoire ne commence, tous les acteurs ont une tête de suspect potentiel. Le fait que les personnages se ressemblent ne simplifie pas non plus la tâche du lecteur. Ajoutées à cela, les couleurs sombres de cet album n'invitent guère le lecteur à découvrir cet album qui flaire le vieux papier peint défraîchi...

Maintenant, vu d'un autre côté, cette BD est bien pensée dans sa fabrication. Albin Michel nous offre ici un ouvrage qui sent bon la nostalgie des vieux trésors qui hantent encore les greniers de nos grands-parents. Quel plaisir de retrouver la saveur d'un grand format au dos rond et aux feuilles épaisses. Rien que cet aspect-là poussera les curieux à s'attarder sur cet album qui, en plus de sa qualité éditoriale, rend agréablement l'atmosphère du passé.

Revenons sur les personnages préalablement critiqués, force est de constater que les dessins de Marniquet reproduisent fidèlement le côté sombre et grave des individus d'antan. Il suffit de regarder les vieux portraits de l'arrière-arrière-grand-maman qui trône encore chez tonton Jules pour se rendre compte du caractère austère et figé des portraits de la première moitié du 19ème siècle.

A défaut de plaire, cet album amusera sans aucun doute les lecteurs. Avec de nombreux clins d'yeux au cinéma de papa, le scénario de Philippe Chanoinat est rondement mené. L'auteur jongle avec les jeux de mots multiplie les répliques d'anthologie "c'est beau mais c'est loin..." pour notre plus grand plaisir.